mardi 8 février 2011

Symbolo - Le Carré SATOR... Magique et palindromique de tous les côtés...


Le carré Sator est un carré magique contenant le palindrome latin SATOR AREPO TENET OPERA ROTAS.
Le carré figure dans plusieurs inscriptions, la plus ancienne connue remontant à l'an 79.
Les lettres de la phrase sont inscrites dans un carré de 5 cases sur 5 de telle façon qu'elle puisse être lue de haut en bas, de bas en haut, de gauche à droite et de droite à gauche :

S A T O R
A R E P O
T E N E T
O P E R A
R O T A S
ou en sens inverse :
R O T A S
O P E R A
T E N E T
A R E P O
S A T O R
 
Le carré peut également être lu en boustrophédon, la phrase devenant alors SATOR OPERA TENET AREPO ROTAS.

Le carré est composé des cinq mots suivants :
  • Sator : laboureur, planteur ;
  • Arepo : signification inconnue ;
  • Tenet : [il/elle] tient (du verbe teneo) ;
  • Opera : œuvre, travail ;
  • Rotas : roues.
Le mot AREPO est un hapax qui n’apparait nulle part ailleurs dans la littérature latine, et plusieurs interprétations lui ont été appliquées. Il serait soit un nom propre, soit une forme gauloise du mot charrue comme le propose Jérôme Carcopino, soit une forme hébraïque ou une allusion au dieu Apis.
Les autres mots signifient : sator, le laboureur - tenet, (il /elle) tient ou dirige - opera, l'œuvre, le travail (à l'ablatif singulier, operā peut signifier "avec soin") - rotas, les roues.
De nombreux exégètes se sont penchés sur la signification qu'on peut donner à cette suite de mots, plusieurs versions sont possibles, faisant intervenir des grilles religieuses, alchimiques, numérologiques ou kabbalistiques.

Les traductions les plus simples et littérales étant : « Le laboureur guidant la charrue travaille en tournant» ou encore « Le semeur Arepo conduit les roues avec soin ».
La plus ancienne représentation de ce carré a été trouvée dans la villa de Pasquius Proculus et de son épouse dans les ruines de Pompéi, ce qui le date au moins de 79 apr. J.-C. Par la suite, on le retrouve en de nombreux lieux, principalement des monuments religieux chrétiens en de nombreux endroits du monde.
D'autres ont été trouvés dans des excavations à Corinium (actuelle Cirencester en Angleterre ; le texte est ROTAS OPERA TENET AREPO SATOR), Doura Europos (actuelle Syrie) ou au musée de Conimbriga au Portugal. Le carré existe également sur un mur du vieil Oppède en France, à Manchester en Angleterre, sur le mur de la cathédrale de Sienne ou dans une inscription en marbre à l'abbaye de San Pietro ad Oratorium près de Capestrano en Italie, entre autres. Dans un cas découvert à l'abbaye de Valvisciolo, également en Italie, les lettres forment cinq anneaux concentriques, chacun divisé en cinq secteurs. Il en existe également un sur une porte fort ancienne de la rue Jean-Jacques Rousseau à Grenoble.

L'explication chrétienne

Le carré Sator aurait été composé par les premiers chrétiens, qui étaient poursuivis et devaient se cacher, et leur aurait servi de code de reconnaissance. Sa composition est étonnante de complexité : on observe que le mot tenet forme une croix dont les quatre branches sont terminées par la lettre T (dont la forme renvoie elle-même à la croix) entourées des lettres A (en grec, alpha) et O (en grec, oméga) qui évoquent Dieu, désigné comme l'Alpha et l'Oméga au moment de l'apocalypse, c'est-à-dire l'origine et la finalité de toutes choses. De plus, on peut, avec les 25 lettres du carré, former une croix écrivant Pater Noster complétée de deux A et deux O, porteurs de la symbolique évoquée ci-dessus.

À Rome, on retrouve ces deux dessins gravés sur les murs et sur les tombes des premiers sanctuaires chrétiens.
Dans le même registre, il y avait aussi le "poisson", symbolisé par la lettre N centrale, ce N, soit 'noun' signifiant poisson en araméen ; le poisson en grec se dit ΙΧΘΥΣ (ikhthus ou ichtus), acrostiche de la déclaration de foi : I : ΙΗΣΟΥΣ (Iēsous), X : ΧΡΙΣΤΟΣ (Khristos), Θ : ΘΕΟΥ (Théou) Υ : ΥΙΟΣ (Uios), Σ : ΣΩΤΗΡ (Sōtēr), ce qui signifie : Jésus, Christ, Fils de Dieu, Sauveur.

[Réf : Pompei[Palestra Grande] Nautilus, l'enigme de l'empire, Osvaldo Rea, ISBN 88-901473-7-7]

L'explication juive

Une interprétation récente d'un jeune chercheur aurillacois, Nicolas Vinel, donne une lecture plus juive que chrétienne, rapportée dans le n° 173 de la Revue de l'histoire des religions. En voici l'essentiel :
Il a eu l’intuition qu'un lien existait entre le célèbre carré de lettres et les carrés de chiffres, dits « magiques », dont il avait par ailleurs mis en évidence l’origine pythagoricienne à partir d'un passage du philosophe syrien Jamblique (IIIe-IVe siècle de notre ère). La pratique de ces carrés magiques n'était jusque-là attestée en Occident qu’à partir du XIVe siècle de notre ère. À cette date, un traité byzantin leur est consacré, qui donne un exemple de carré magique de 5. Nicolas Vinel a soupçonné que l'exemple du traité byzantin, s'il était bien une émanation pythagoricienne, pouvait avoir servi à coder le carré Sator de Pompéi. Le berceau du pythagoricisme étant précisément l'Italie du Sud, l'hypothèse n'était pas absurde. Restait à encoder celui-ci {ROTAS - 12345, OPERA = 678910...) et à le convertir en lui appliquant le chiffre transmis par les Byzantins.

*11 24 07 20 03*   T O P O T
* 4 12 25 08 16*   A E R E A
*17 05 13 21 09*   R S N S R
*10 18 01 14 22*   A E R E A
*23 06 19 02 15*   T O P O T

Le résultat est frappant. La parfaite symétrie de toutes les lettres autour du N central saute d'abord aux yeux. En scrutant davantage, l'observateur repérera le double mot AEREA que relient de chaque cote deux ARA, pour former un rectangle de 3 sur 5 cases. Dans le latin du Ier siècle, la locution signifie « autel de bronze ». Un familier de l'Ancien Testament pensera alors aux descriptions de l'autel de bronze, dont le livre de Josué fait le symbole de la présence de YHWH pour le peuple en exil (Ex 27,1-2; 2 Ch 6; Jos 22,28-29). Il verra peut-être sinuer les lettres de SERPENS au-dessus et au-dessous d'AEREA, comme le « serpent de bronze » que brandit Moise au désert pour sauver ses compatriotes d'une mort certaine (Nb 21,6-9). Le TENET pointant en diagonale vers les angles lui rappellera l’immunité assurée à celui qui saisissait l'autel par une corne (1R 1,50). Et si notre examinateur n'est pas encore convaincu que le carré désigne explicitement la présence et le salut divins, Nicolas Vinel passera du latin... à l'hébreu, comme le font volontiers les inscriptions juives antiques. Il expliquera alors que les quatre OT qui enserrent le tableau sont précisément la transcription du mot « signe » et que le Taw hébraïque, coincé dans les angles, est aussi le signe que YHWH ordonna d'écrire sur le front des justes (Ez 9,4). Dans le cas particulier du Sator de la palestre de Pompéi, une épigraphe, SAUTRAN VALE, a été ajoutée sous le SATOR de la ligne inférieure. Un hébraïsant ne manquera pas leur racine commune STR, qui renvoie a l'idée de « cacher, protéger ». Ce que fait en somme le carré !


[Sources :

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